Carbone

Publié par les élèves du lycée Baudelaire sur 18 Novembre 2017, 19:14pm

Un coup de poing, voilà ce qu'est Carbone, réalisé par Olivier Marchal. Le film, inspiré d'une histoire vraie, nous montre que l'être humain ne peut s'empêcher de transformer un besoin de survie en moyen pour obtenir toujours plus d'argent et de pouvoir. Car Antoine Roca (Benoît Magimel) n'est pas un criminel, à la base. C'est un homme fatigué, endetté jusqu'au cou avec son entreprise. Il essaye par tous les moyens de survivre dans un monde où "être honnête ne paye pas". Il va donc, avec le soutien de son comptable et ami (Michael Youn), et de deux frères (Simon et Eric Wizman, joués respectivement par Gringe et Idir Chender), mettre au point une arnaque qui va devenir le casse du siècle. Les quatre compagnons vont se heurter au grand banditisme, aux trahisons et aux règlements de comptes.

J'ai adoré Carbone, car ce film nous plonge au cœur des hommes. C'est un film humain, le cadre géographique et temporel étant très secondaire. On sait que le film se passe en région parisienne, et encore, grâce à la tour Effeil présente sur certains plans, où la rare mention du nom de la ville dans les dialogues. L'important dans ce film, c'est les hommes et leur complexité.

D'ailleurs on le voit très bien par les partis-pris de réalisation : les plans sont serrés, voire très serrés, et nous transmettent les émotions torturées des personnages. Il y a très peu de plans larges, qui sont souvent présents quand de nombreuses personnes sont présentes à l'écran. La lumière est elle aussi particulièrement travaillée. Dans ce film sombre, l'action se passe souvent la nuit, où dans des pièces peu éclairées. Benoît Magimel est souvent filmé en contre-jour ou presque, montrant que le personnage d'Antoine Roca possède une face sombre et dangereuse. Cette ambiance ténébreuse est renforcée par les vêtements, qui sont presque tout le temps noirs, si bien qu'on a l'impression que les personnages sont constamment à un enterrement. Même la superbe Porsche de Roca est noire, preuve que l'argent qui a permis son achat est de l'argent volé. Les rares moments de lumière du film sont des scènes où Antoine Roca est auprès de sa famille, qui le "raccrochent" en quelque sorte à sa vie d'avant, d'honnête chef d'entreprise. La scène la plus lumineuse du film est d'ailleurs une scène où Roca et son fils rendent visite à la mère d'Antoine. Le soleil et les couleurs de la campagne contrastent avec l'allure sombre d'Antoine Roca, qui a été happé par les ténèbres de la ville et de l'escroquerie.

Le film est très bien structuré. On peut le séparer en deux grandes parties : la mise en place de l'arnaque et le gain de millions d'euros, et la descente aux enfers. Cette séparation est symbolisée par le dîner où Eric Wizman ivre mort fait un scandale en plein gala. Ce signe annonciateur de la chute des quatre compères entame la descente aux enfers. Ce qui est intéressant dans ce film, c'est que tout le long on sait que les personnages ne s'en tireront jamais. Tout le monde, sauf les quatre escrocs, sait que cette arnaque les conduira à leur perte. Les quatre arnaqueurs sont comme des Icare : ils ont volé tout près du Soleil, trop près, et cela a provoqué leur chute. La musique est elle aussi en accord avec le film : on notera la présence de deux chansons d'Orelsan de son album Le Chant des Sirènes, qui accompagnent parfaitement l'ambiance du film.

Pour finir, je salue la prestation des acteurs, qui nous immergent dans cet univers sombre et torturé. Benoît Magimel est bouleversant dans son rôle. J'ai également beaucoup apprécié le jeu de Gringe, qui incarne en quelque sorte le bon sens des frères Wizman. Le rappeur n'en est pas à son premier film, car il a déjà joué dans Comment C'est Loin (réalisé par Orelsan, son camarade du duo Casseurs Flowters), et dans la série Bloqués produite par Canal Plus, où il donne toujours la réplique à Orelsan. Gringe confirme sa qualité d'acteur avec Carbone. Je recommande vraiment le film, si vous aimez les films policiers profonds et viscéraux.

Noé Bastard

Ça

Au revoir là-haut

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